Quelle a été la spécificité du Sietta 2023 ?
Le Sietta 2023 a été l’occasion pour les équipementiers locaux de montrer leur savoir-faire en proposant pour l’exposition, une ligne complète de transformation du cajou made in Côte d’Ivoire. Désormais, le premier attelage d’une usine de transformation d’anacarde, entièrement montée par des professionnels nationaux, est disponible. Cette usine est le fruit d’une synergie d’actions des différents équipementiers ivoiriens constitués. Cette ligne complète de transformation est pour nous, une fierté car depuis longtemps, on n’avait pour seul recours dans la transformation que les technologies des pays d’Asie du sud-est. Aujourd’hui, avec un groupement d’entreprises mises ensemble, le résultat est satisfaisant. Cette initiative est née du partenariat entre le Conseil du coton et de l’anacarde, à travers le Projet de promotion de compétitivité de la chaîne de valeur de l’anacarde (Ppca) et la Banque mondiale.
Le thème de cette année est : « Contribution de l'industrie du cajou à la résilience des pays africains face aux défis économiques mondiaux ». Pouvez-vous répondre à cette problématique, en tenant compte du cas spécifique de la Côte d’Ivoire ?
La Côte d’Ivoire est le leader mondial de la production de noix brutes de cajou depuis 2016, avec un chiffre record de plus d’un million de tonnes au terme de la campagne de commercialisation en 2022.
Avec 6% en moyenne de taux de croissance de la production par an, l’anacarde est l’une des principales sources de revenus des populations rurales de la zone nord de la Côte d’Ivoire.
Pour aborder la question de la résilience économique de la Côte d’Ivoire en lien avec l’industrie du cajou, il est bon de relever que l’industrie du cajou en Côte d’Ivoire est en plein essor. Déjà, la production fait vivre environ 400 000 familles. La transformation locale a enregistré ses meilleures performances depuis 2020, c’est-à-dire au cœur de la crise Covid-19. C’est le signe qu’en dépit des impacts de la pandémie sur l’écosystème mondial du cajou, l’industrie du cajou en Côte d’Ivoire a continué sa progression. D’ailleurs, c’est en 2021 que la Côte d’Ivoire s’est hissée au rang de 3e exportateur d’amandes de cajou au monde, derrière le Vietnam et l’Inde. Lorsque l’industrie se développe, comme c’est le cas de l’anacarde, des emplois sont créés, des taxes sont reversées à l’Etat et des revenus surs sont reversés aux fournisseurs de la matière première, en l’occurrence les producteurs. En 2022, nous avons dénombré environ 15 000 emplois créés dans le secteur de la transformation, principalement dans les régions de production. On a ainsi une sorte d’économie circulaire qui constitue un levier de la résilience de l’Etat face aux crises multiformes.
Quel est le taux de transformation de l'anacarde en Côte d’Ivoire ? Peut-on connaître le nombre d'unités de transformation, la capacité installée en 2023 ?
En 2022, 224128 tonnes de noix ont été transformées localement contre 68515 tonnes en 2018, soit 3,27 fois plus.
Aujourd’hui, le taux de transformation locale est d’environ 22 % contre 10% en 2018.
De 15 unités industrielles en 2018, nous en sommes aujourd’hui à 34 unités opérationnelles et au moins une dizaine en chantier. En termes de capacité installée en 2023, nous en sommes à 350 000 tonnes par an. Tout ce dispositif devrait permettre d’accélérer la transformation et porter à au moins 35 % le taux de transformation dès la fin d’année 2023.
Quels sont les défis qui s'imposent à l'industrie pour accroître ce taux?
La Côte d’Ivoire ambitionne de relever le taux de transformation locale à 50% d’ici 2025. Le défi majeur de la transformation reste à faire passer la Côte d’Ivoire du statut de premier producteur et exportateur de noix brutes à pays producteur et exportateur d’amandes.
L’un des obstacles pour accélérer le développement du tissu industriel, en général, est la disponibilité de lots industriels aménagés avec des commodités, notamment l’électricité de bonne qualité, ainsi que le financement de la matière première.
On peut également citer les questions de capacité de stockage qui permettent d’approvisionner les unités de transformation l’année.
Un autre défi, et non des moindres, est la disponibilité de la main d’œuvre de qualité. Y compris la capacité des investisseurs eux-mêmes à appréhender les difficultés du secteur et à mettre en place un business viable. L’aventure industrielle a ses exigences. Il faut s’y préparer, faute de quoi, l’aventure peut tourner court.
Que gagne le premier pays producteur à accroître la transformation de son produit ?
Selon les statistiques, la production ne représente que 20% de la chaîne de valeur de l’anacarde contre 40% pour la transformation et 40% pour la distribution. C’est dire que c’est dans la transformation et la distribution qu’il y a d’importantes retombées dans cette filière. Nous devons donc aller à la transformation. En sus, il importe de relever qu’il y a une centaine de sous-produits issus de la transformation. Ces produits sont utilisés notamment dans la pâtisserie, la cosmétique, la boisson et la cuisine. Nous avons intérêt à aller à la transformation pour tirer des dividendes de notre forte production. En réussissant la transformation, nous allons booster notre économie.
Quelles sont les différentes initiatives de l'Etat pour augmenter le taux de transformation de la noix de cajou en Côte d’Ivoire ?
Pour accélérer la transformation, le gouvernement a mis en place un dispositif de facilitation spécifique afin d’accompagner les investisseurs dans le secteur de l’anacarde.
Pour atteindre le taux significatif de 50% de transformation locale, les actions clé engagées par le gouvernement et mises en œuvre par le Conseil du coton et de l’anacarde sont multiples. Il s’agit notamment de l’installation du Centre d’innovations et des technologies de l’anacarde (Cita) à Yamoussoukro. Ce centre est un pôle technologique qui accompagne les candidats à l’investissement dans l’industrie de l’anacarde en termes d’études préparatoires, de dimensionnement des usines, de formation du personnel, etc.
Il y a en outre l’aménagement de trois zones agroindustrielles de 15 à 25 hectares dédiées à la transformation de l’anacarde au cœur des zones de production à Korhogo, Bondoukou et Séguéla. Ces parcs industriels offrent toutes les commodités qui permettent à un industriel d’être très vite opérationnel dès la validation de son projet. Les zones industrielles dédiées de Korhogo et de Bondoukou sont déjà prêtes à accueillir les premiers demandeurs de lots industriels.
Il y a en sus les subventions aux transformateurs pour encourager la transformation locale.
Enfin, en termes de capacité de stockage, au-delà des entrepôts de 7 500 m² prévus sur chacune des zones agro industrielles dédiées à l’anacarde, un centre logistique avec plus de 21 000 m² d’entrepôts est en cours d’aménagement à la zone industrielle de Yamoussoukro pour régler les questions de stockage, de flux et de transit de noix brutes de la région.
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