Douze ans après l'enlèvement et l'assassinat tragiques des journalistes de RFI, Ghislaine Dupont et Claude Verlon, au Mali, une nouvelle démarche a été entreprise en octobre pour obtenir la déclassification de documents classés secret-défense.

L'avocate Marie Dosé, représentant l'association "Les amis de Ghislaine Dupont et Claude Verlon", a révélé lors d'une conférence de presse le dépôt d'une demande de déclassification ciblant spécifiquement Mohammed Ag Hellah. Ce dernier est un membre présumé du groupe jihadiste Ansar Dine, identifié comme le chef du campement où s'étaient réfugiés les ravisseurs après le double assassinat.

Ghislaine Dupont (57 ans) et Claude Verlon (55 ans) ont été enlevés et tués par balles le 2 novembre 2013, près de Kidal, dans le nord du Mali. Ils étaient en reportage pour RFI, quelques mois après le lancement de l'opération française Serval, destinée à repousser les groupes jihadistes. Bien qu'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) ait revendiqué l'acte, les circonstances précises du drame demeurent floues. La version officielle indique qu'un convoi militaire français avait découvert les corps des journalistes près du pick-up de leurs ravisseurs, tombé en panne. Les enquêteurs privilégient la thèse d'une prise d'otages manquée par un groupe jihadiste.

Une instruction de douze ans et de nouveaux éléments

L'instruction judiciaire, qui s'étire sur douze années, a vu se succéder trois juges d'instruction, le dernier ayant repris le dossier en mars.

Selon Danièle Gonod, présidente de l'association, l'analyse des données de téléphonie a permis de "mettre en évidence l’importance du réseau criminel" impliqué dans l'enlèvement. L'exploitation de ces données, croisée avec de nouveaux témoignages, a éclairci le rôle de deux individus clés, dont Cheikh Ag Haoussa.

Qualifié de "combattant touareg charismatique" par Me Dosé, cet ancien membre d'Ansar Dine était devenu à Kidal "le principal interlocuteur des forces françaises et de la Minusma" (mission de l'ONU). L'avocate précise qu'il avait été interviewé par Ghislaine Dupont le 30 octobre 2013 et "a été vu dans son véhicule à Kidal en compagnie de Baye Ag Bakabo", chef présumé du commando, "quelques heures avant l’enlèvement". Il aurait ensuite été sollicité par l'armée française pour "reconnaître le véhicule des ravisseurs".

Cheikh Ag Haoussa est mort en octobre 2016 dans l'explosion de sa propre voiture. L'avocate a conclu en demandant au magistrat instructeur de se pencher sérieusement sur le rôle de ce protagoniste.