Angola: 50 ans après l'indépendance, la jeunesse rêve de liberté et de prospérité
L'Angola commémore un demi-siècle de souveraineté, 50 ans après son indépendance, proclamée le 11 novembre 1975. Mais dans un pays où la majorité de la population est née après la guerre civile, la fête laisse place à une interrogation : que signifie être libre quand la paix n’a pas apporté la prospérité promise ?
Cinquante ans plus tard, cette date n'est pas qu'un anniversaire : c'est une question ouverte, un miroir tendu à la nation. Que signifie, en 2025, être indépendant ? Et que reste-t-il de la promesse de 1975 : celle d'un État juste, égalitaire, capable de réparer cinq siècles de domination et de transformer la liberté politique en justice sociale ?
L'Angola de 2025 est un paradoxe vivant. Il est riche en ressources naturelles — pétrole, gaz, diamants -, mais pauvre en infrastructures. Sa capitale, Luanda, est hérissée de tours de verre et d'acier face à une mer d'habitations précaires. Un pays de plus de 37 millions d'habitants, dont près de 70 % ont moins de 30 ans : une population dynamique, urbaine, mais frustrée.
L'indice de développement humain de l'ONU classe le pays à la 148ᵉ place sur 193 : en dépit de nets progrès entrepris depuis la fin de la guerre civile, en 2001, le fossé perdure entre les promesses et la réalité du quotidien.
Le président João Lourenço, élu en 2017 après trente-huit ans de règne de José Eduardo dos Santos, aime à rappeler que « l'indépendance n'est pas un point final, mais un travail continu ». Sous sa présidence, le pays tente de tourner la page d'un autoritarisme ancien et d'une économie totalement dépendante du pétrole. L'Angola a quitté l'Opep fin 2023, pour retrouver la maîtrise de sa production. Il investit dans le gaz, la raffinerie de Lobito et la diversification agricole. Mais le poids de la rente pétrolière demeure : elle finance plus de 80 % du budget de l'État.
La génération de la paix, ces jeunes qui n'ont connu ni la guerre d'indépendance ni la guerre civile, représente aujourd'hui plus de 70 % des Angolais. Elle n'a pas hérité des privations du passé, mais elle affronte une autre forme de combat : celui contre le chômage, la précarité et la défiance politique.
Selon l'économiste Francisco Paulo, le marché du travail demeure dominé par l'économie parallèle : « Sur 12 millions d'actifs, 10 millions travaillent dans le secteur informel. Cela représente plus de 80 % des emplois, une véritable bombe sociale. » Malgré deux décennies de paix, le développement économique reste fragile. L'accès à un emploi stable est rare, surtout pour les jeunes diplômés. « Le problème n'est plus la guerre, mais la distribution des richesses et la liberté économique », estime Francisco Paulo.
Dans les grandes villes, la jeunesse alterne petits boulots, commerce de rue et longues attentes. L'économie pétrolière n'a pas permis de diversifier les opportunités. La croissance profite à une minorité, tandis que les inégalités se creusent.
Le lien entre le citoyen et l'État reste marqué par la méfiance. La militante Laura Macedo décrit un climat de tension silencieuse : « Le citoyen a peur du pouvoir et le pouvoir a peur du citoyen. Cette peur réciproque finit par engendrer la révolte. » Elle souligne une évolution générationnelle : « Ceux qui nous dirigent ne peuvent plus nous menacer avec la guerre. Cela ne nous fait plus taire. » Pour elle, cette rupture symbolise la fin d'un cycle : la guerre cesse d'être un argument politique. Mais la liberté d'expression demeure fragile, limitée par les pressions administratives, policières et sociales.
Commentaires (0)
Participer à la Discussion