Des enfants de Madagascar aux voitures de luxe… L’influenceur Dylan Thiry jugé pour abus de confiance
procès•L’ancien candidat de télé-réalité est soupçonné d’avoir détourné des cagnottes humanitaires à hauteur de 255.000 euros
asquette des New York Yankees sur la tête, tee-shirt blanc, short beige, Dylan Thiry verse du riz dans les assiettes que lui tendent des enfants pauvres de Madagascar. « Ce que j’essaie de mettre en place, c’est vraiment qu’après mon départ, cet endroit-là, ils pourront y dormir, la journée ils pourront jouer, et ils auront deux repas qui les attendent le midi et le soir », déclare tout sourire à la caméra l’ex-candidat de Koh-Lanta, qui préside alors l’association « Pour nos enfants ».
Un beau moment de partage et de générosité que ne reflètent étonnamment pas les commentaires postés sous la vidéo d’une durée de 3 heures, diffusée sur YouTube en novembre 2024, soit deux ans après le tournage. « Voyou », « Arnaqueur, laisse mon peuple tranquille », « Honte à toi », « Escroquerie », peut-on lire.
Il faut dire que la justice le soupçonne d’avoir détourné une partie importante des dons récoltés pour venir en aide aux enfants pauvres de Madagascar : plus de 255.000 euros qui ont été virés sur son compte bancaire en Lituanie. Ce lundi, Dylan Thiry est jugé en correctionnelle à Paris pour abus de confiance.
Il encourt cinq ans de prison et 375.000 d’amende. Mehdi Mazi, le cofondateur du collectif Aide aux victimes d’influenceurs (Avi), souhaite que les magistrats prononcent à l’encontre de l’influenceur suivi par 2,3 millions de personnes sur Instagram une « sanction dissuasive ». « J’espère que cela mettra fin à ce sentiment d’impunité qu’ont certains influenceurs », explique-t-il à 20 Minutes.
C’est en 2022 que Dylan Thiry se lance dans l’humanitaire. Il se rend alors à deux reprises à Madagascar. Pour financer ses projets, il lance un appel aux dons et ouvre deux cagnottes sur la plateforme Cotizup. Un succès. Mais très vite, quelques donateurs sont pris de doutes et se rapprochent du collectif Avi.
« Au regard du comportement et du passif de ce personnage, il était légitime de se poser des questions », poursuit Medhi Mazi. A l’époque, l’ancien candidat de téléréalité fait parler de lui pour avoir fait la promotion, sur les réseaux sociaux, de pilules censées guérir « les cellules cancérugeuses », « une dinguerie ».
Les personnes qui ont répondu à l’appel lancé constatent qu’il y a « un fossé entre ce qui a été fait sur place, ce qu’il disait qui avait été fait, et ce qui avait été collecté. On s’est renseigné auprès d’ONG qui agissent à Madagascar. On leur a posé des questions sur les coûts des choses montrées par Dylan Thiry. Et on s’est rendu compte qu’il y avait un problème », raconte Medhi Mazi.
« Quand on a creusé, on a découvert d’importantes anomalies de gestion. L’association a été dissoute subitement fin 2022. Alors qu’elle avait collecté une somme importante, il apparaissait qu’elle n’avait plus aucun actif, plus aucun fond. Dylan Thiry, lui, continuait de faire des appels aux dons sur la cagnotte de cette association alors qu’elle n’existait plus.
On s’est donc décidé, en janvier 2023, à aider ces donateurs à faire valoir leurs droits et à déposer plainte », indique Medhi Mazi. L’enquête, confiée à la Brigade de répression de la délinquance astucieuse (BRDA), a révélé qu’il avait « utilisé ces fonds à des fins personnels, pour acheter des véhicules de luxe entre autres », déplore le cofondateur du collectif Avi.
Contacté par 20 Minutes, l’avocat de l’influenceur établi à Dubaï, Me Jonathan Bellaïche, n’a pas souhaité faire de commentaire avant l’audience. Il comparaît au tribunal aux côtés de Sandra D., la vice-présidente de l’association dissoute fin 2022. La justice lui reproche notamment d’avoir effectué « des virements depuis la plateforme de dons vers le compte personnel de Dylan Thiry, qui les réclamaient », indique à 20 Minutes son avocat, Me Tom Michel. Mais, dit-il, sa cliente a elle aussi été « victime » de l’influenceur luxembourgeois, dont elle a dénoncé les agissements en allant déposer plainte début 2023.
« C’est une lanceuse d’alerte », estime Me Michel. « C’est une mère de trois enfants, âgée d’une quarantaine d’années, qui n’a rien à voir avec le milieu de l’influence et qui a voulu s’engager dans un projet sans penser qu’il pouvait mener à ce genre de conclusion judiciaire. »
Quand Dylan Thiry, qu’elle a rencontré par l’intermédiaire d’une amie commune, lui a parlé de ce projet d’association, « elle a vu l’opportunité de faire autre chose de sa vie ». Mais plus le temps passe, plus l’influenceur se montre « irascible, ingérable », poursuit son avocat. Elle « insiste pour ouvrir un compte bancaire pour l’association », il refuse et demande que les transactions financières soient effectuées avec son RIB personnel. Il ne fournit aucun justificatif de dépense.
« Pas une seconde, aucune des trois membres du bureau ne pouvait se douter qu’il y avait un détournement d’argent à cette échelle-là, reprend Me Michel. Il a toujours affiché sur les réseaux sociaux un train de vie luxueux. Elles pensaient que tout l’argent avait été dépensé. Or, il s’avère qu’il en restait une partie importante. Mais elle n’en a tiré aucun bénéfice. Elle attend ce procès, qui sera pour elle un moment de clarification. »
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