Le procès devant la Cour criminelle spécialisée s'est transformé en une véritable "autopsie nationale", le réquisitoire du Procureur Général (PG) ayant exposé de manière implacable le fonctionnement et la décadence d'un système. L'affaire, qui a mis au jour le vol des deniers publics, a été dépeinte comme un "holocauste financier", dont les sommes avouées ne sont que "la face visible de l'iceberg".

Le choc des révélations a été symbolisé par la question lancée par Nourreddin Bongo Valentin : "Est-ce que tu réalises ça ?" lors de la découverte des valises d'argent. Le PG a interprété cette phrase non comme de la surprise, mais comme un "cri d'effroi" et un "aveu" devant l'effondrement du système, révélant "l’argent volé, l’argent du peuple, l’argent de la République".

👑 Les Métaphores de l'Infamie : Le Procès de la Classe de Privilégiés

Pour dénoncer l'ampleur du pillage et l'arrogance des accusés, le Parquet Général a puisé dans l'histoire de la haute trahison.

Ian Ngoulou : Le "Nouveau Fouquet" Gabonais

L'ancien collaborateur Ian Ghislain Ngoulou a été comparé à Nicolas Fouquet, le surintendant des finances dont le faste personnel avait défié l'autorité royale en France. Le parallèle est justifié par l'énormité des découvertes :

1. Le "Trésor de la Terreur" : Plus de 4 milliards de FCFA en espèces découverts à son domicile. Ces fonds étaient un "stock de redistribution" illégal, destiné à la corruption électorale, aux "services occultes" et à l'achat de loyautés.
2. La Corruption du CGE : Ngoulou a avoué avoir remis 500 millions de FCFA au président du Centre Gabonais des Élections (CGE) sur ordre de Nourreddin, un acte requalifié en complicité de corruption active pour manipulation électorale.
3. L'Auto-Blanchiment : L'enrichissement est insolent : l'acquisition de vingt-sept appartements avec piscine dans la même cité, sans aucun prêt bancaire ni revenu déclaré proportionné, caractérise un "auto-blanchiment" au détriment de l'État.

La "Young Team" : Des "Fils du Roi" Amateurs de Scandales

L'entourage de Nourreddin Bongo, incluant Abdul Oceni Ossa, a été dépeint comme les "fils du Roi" qui traitaient le pays comme leur "cour de récréation". Le réquisitoire a dénoncé un Gabon laissé aux mains de "collégiens" férus de poker, de PlayStation, et avides de soirées extravagantes ("bunga bunga" ou "breaks off").

« Est-ce que vous réalisez que lorsqu’on laisse les reliques de la République entre les mains d’adolescent, les secrets sont dehors ? » - Le Procureur Général

Cette "association de malfaiteurs" (Ngoulou, Saliou, Oceni Ossa, etc.) avait mis en place un "véritable système solaire criminel" pour capter les fonds, avec une répartition des rôles allant du détournement aux interventions fiscales illégitimes.

💰 Concussion et Système Parallèle de Rémunération

Le réquisitoire a ensuite ciblé Mohamed Ali Saliou, qualifié de "validateur institutionnel" du système :

1. Concussion Organisée : Saliou percevait des primes fixes de 80 millions FCFA par mois, des primes variables allant jusqu'à 450 millions FCFA, et des "bonus pétroliers" illicites. Ces montants, sans base légale ni décret, constituaient un système parallèle de rémunération et sont qualifiés de concussion – la trahison morale d'un agent public exigeant des sommes indues.
2. Patrimoine Indécent : Les fonds détournés ont servi à financer un patrimoine immobilier et mobilier estimé à plus de 8 milliards de FCFA, dont une collection de 20 montres de luxe pour 1,4 milliard. Saliou était "la légitimité administrative du détournement", son pouvoir de visa sur les plus gros contrats lui ouvrant les portes du Trésor.

Le Procureur Général a conclu en appelant la Cour à saisir ce dossier non comme une simple analyse, mais comme le "vertige" d'une justice qui, au nom des pères fondateurs, doit mettre un terme à l'impunité et à l'arrogance d'hier.