GABON : “J’AI ÉTÉ VIOLÉE PAR MON ONCLE”
Le viol sur mineurs reste un sujet douloureux, souvent entouré de silence et de honte. Nadine, un nom d'emprunt, est une jeune gabonaise de 19 ans, brisée par des années d'abus et de violences subies depuis son enfance.
Et aujourd'hui, elle tente de se reconstruire malgré les séquelles encore présentes. Un témoignage bouleversant recueilli. Le silence continue de ronger le cœur de Nadine. Nadine, un silence né d'un traumatisme vécu il y a près de douze ans, alors qu'elle n'était qu'une enfant. À l'époque, elle vivait à Koulamoutou, dans une maison familiale, où elle aurait dû se sentir en sécurité. Mais à Libreville, son oncle a abusé d'elle à plusieurs reprises avec barbarie.
"J'ai été violée à 7 ans par le grand frère de ma mère. On résidait à Koulamoutou, mais on venait toujours passer les vacances chez mon oncle à Libreville. A chaque vacances scolaires, on allait toujours chez lui là-bas, passer les vacances, comme maman et moi et plus mon père. Il prenait la taie d'oreiller pour me mettre au visage, pour ne pas que je puisse crier. Et en plus il me violait"
raconte-t-elle.
"Et j'ai toujours dit ça à ma mère, j'ai dit ça à ma mère, elle ne m'a jamais crue"
"Elle me disait toujours que non, son grand frère ne peut pas faire ça, son grand frère on ne peut pas faire ça"
"Il m'a violé de 7 à 12 ans"
Comment une mère peut-elle étouffer ce genre de scandale ? Comment une mère peut-elle livrer sa fille à un violeur invétéré ? C'est ce que la famille aurait préféré pour éviter la honte, pour protéger le non. Mais cette omerta a laissé des traces profondes. À 19 ans, Nadine vit toujours avec la peur, les cauchemars et la douleur d'un passé qu'elle n'a jamais choisi.
"On a parlé de ça, mais jusqu'à aujourd'hui, l'affaire s'est éternisée. On n'est pas allé chez les autorités"
"Mes cris et appels au secours se sont éternisés au milieu de ma famille comme ça. Mes parents ont fermé ça comme ça"
"Mais moi aujourd'hui, je vis avec ce traumatisme parce que j'ai déjà un enfant. Aujourd'hui j'ai 19 ans d'âge. Si on compte depuis mes 12 ans, que l'affaire s'est arrêtée jusqu'à aujourd'hui, je vis avec un traumatisme qui n'est pas facile pour moi parce qu'il y a eu vraiment des choses qui se sont passées"
"Vraiment, je veux dire que peut-être c'est Dieu qui a envoyé mon grand frère le jour-là, parce qu'en allant à l'hôpital avec mon grand frère à la clinique à Glace, on a découvert que j'avais des cailloux de sang à l'intérieur de moi, et c'est le gynécologue qui m'avait nettoyé"
"Le gynécologue m'a nettoyé et le gynécologue a dit que mes lèvres sont blessées, les lèvres du bas sont blessées, et je n'ai même pas pu accoucher par voie basse".
"À cause de cela, jusqu'à dans ma relation avec le père de mon enfant, c'est un peu difficile parce qu'à chaque fois qu'on a des moments intimes, les images reviennent dans ma tête et parfois on s'arrête"
Pourtant l'aide psychologique reste rare et la peur de parler demeure omniprésente. Beaucoup de victimes n'osent pas porter plainte, redoutant le regard des autres ou la réaction de leurs proches. Les cas de viol sur mineurs sont nombreux au Gabon. Mais les condamnations restent peu fréquentes.
"J'ai grandi comme ça, je n'ai pas été suivie par un psy parce que personne ne m'a amenée. Jusqu'à aujourd'hui, plus personne ne parle plus de ma mère, les séquelles sont restées sur moi-même. Parce que je vis avec, ce n'est pas quelque chose qui est facile pour moi"
"Le message que je peux apporter à certains parents, c'est d'être attentif aux enfants, parce qu'un enfant de 7 ans ne peut pas venir mentir"
sur un viol répété.
"Même un adolescent ne peut pas venir mentir sur quelque chose"
"S'ils ne sont pas sûrs de ce que l'enfant dit, ils peuvent aller faire un examen à l'hôpital. Il n'y a qu'un gynécologue qui peut décréter si l'enfant a été violé ou pas. Ma maman, elle n'a rien fait"
"La seule chose qu'elle me disait c'est que son grand-enfant ne peut pas faire ça"
"Même me conseiller, après la réunion qu'on avait eu à faire le matin, qu'on avait parlé de ça"
Après cela sa mère a carrément classé le dossier.
"Ma maman ne m'a plus jamais parlé de ça, me demander comment je me sens, qu'est-ce qui se passe, qu'est-ce que j'ai observé"
"Même m'essayer de m'amener à l'hôpital, ma mère ne l'a jamais fait"
Aujourd'hui, Nadine espère qu'en racontant son histoire, d'autres jeunes filles trouveront la force de parler, de dénoncer et surtout de guérir. Car derrière chaque silence, il y a une vie brisée et un cri qui attend d'être entendu.
“ Ce témoignage est profondément bouleversant. En tant que psychocriminologue, je souligne l’importance de briser l’omerta familiale. Le viol sur mineur est un crime grave, imprescriptible dans certains pays. Pour que justice soit rendue, il faut recueillir des preuves médicales (rapports gynécologiques, traces de traumatismes anciens), consulter les dossiers cliniques et chercher des témoignages familiaux ou de voisins. Le témoignage de la victime, surtout s’il est constant et précis, a une valeur judiciaire importante. Il est très important que l’auteur soit poursuivi afin d’éviter l’impunité et prévenir d’autres agressions”
explique une source médicale.
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