Comme chaque année, le président zimbabwéen, Robert Mugabe, a fêté ses 93 ans dans la grandeur et le faste, suscitant de nombreuses critiques dans le pays.
Organisée par la Ligue de la jeunesse de la Zanu PF, la cérémonie s’est tenue samedi 25 février sur le site de « l’école primaire Cecil Rhodes », rebaptisée pour l’occasion « Matopos Junior School », un nouveau nom désormais irrévocable, la direction de l’établissement ne voulant surtout pas froisser un Robert Mugabe toujours prêt à exprimer son aversion pour le colonialisme. Des dizaines de milliers de personnes se sont rassemblées sur les collines de Matopos au cœur d’un paysage vert et luxuriant, conséquence des pluies torrentielles qui s’abattent sur le pays depuis des mois.
Dans cette province du Matabeleland qui abrite peintures rupestres et monuments à la gloire des Anglais, la région fut aussi le théâtre de massacres dans les années quatre-vingt. Le choix du lieu pour festoyer qui a fait grincer de nombreuses dents et ravivé le souvenir du « génocide » de l’ethnie Ndebele et des massacres de Gukurahundi, une page sombre de l’histoire dont Mugabe n’a jamais reconnue la responsabilité et qui a fait au moins 20 000 morts. Le banquet ouvert à tous s’est même déroulé juste à côté d’une mine désaffectée où des milliers de civils ont été jetés, un épisode macabre que n’a pas manqué de rappeler Morgan Tsvangirai, le leader du parti d’opposition MDC, qui a qualifié cette situation « de honteuse et d’insulte aux victimes ».
« Manger et se divertir »
Pour l’occasion, de grandes tentes blanches ont été dressées pour recevoir les membres du parti présidentiel et les délégations étrangères, principalement venues d’Afrique. Et pour accueillir un maximum de gens, comme chaque année, des centaines de bus ont été affrétés gratuitement. Venus des quatre coins du Zimbabwe, des véhicules remplis d’étudiants, d’écoliers et de citoyens ont convergé vers la fête sous une chaleur écrasante. Protégée du soleil grâce à un grand parapluie, une femme âgée d’une soixantaine d’années s’amuse de toute cette affluence et confesse que les gens « prétendent aimer le chef de l’Etat mais en fait ils sont là pour manger et se divertir ». Juste avant d’entrer pour une fouille en règle, la dame sortira de son sac un foulard à l’effigie du Président et aux couleurs du Parti, soigneusement mis en évidence autour de son cou.
C’est aux alentours de 13h30 que Robert Mugabe a pris la parole face à une foule enthousiaste et réceptive à ses mots sur la famille, sa propre mission sur terre et sa longévité. Deux jours avant la célébration, toutes les écoles de la zone avaient été fermées. Un grand-père plutôt remonté en donne les raisons : « personne ne nous a prévenus, nous avons été informés la veille au soir sans aucune explication et je sais très bien que les locaux ont été utilisés pour faire loger tout le monde ». D’après le responsable de la ligue de la jeunesse de la Zanu-PF, la célébration aurait coûté quelque 2,5 millions de dollars, une somme conséquente lorsque l’on sait que toutes les provinces du pays ont dû participer aux frais en donnant, par exemple, les 150 vaches qui ont servi de festin aux invités.
Avec Jeune Afrique
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