Côte d’Ivoire : Vers le déclin, Alassane Ouattara et son parti paient le prix de leur arrogance

« L’orgueil précède la chute », cette parole divine s’est vérifiée et se vérifie encore aujourd’hui dans la vie de tous ceux qui pensent être arrivés ou n’avoir besoin de personne ; de ceux qui méprisent les autres et n’ont d’yeux que pour leur personne ; de ceux qui pensent avoir toutes les cartes en main et donc peuvent décider du sort de tel ou tel autre.

Pour apposer cette maxime au contexte politique ivoirien, on comprendra que le manque d’humilité et donc un excès d’arrogance est le véritable piège qui a coulé les différents régimes. C’est au moment où il se croyait qu’il était assez fort que Bédié a été chassé par un coup d’Etat. Un mouvement d’humeur des militaires et son régime terrassé. Parce qu’il croyait l’armée à sa disposition, le général Guéi Robert a voulu s’imposer président de la république après l’élection de 2000.

Croyant avoir toutes les cartes en main, et sans sérieusement prêter attention aux rumeurs de préparation d’un coup d’Etat au Burkina Faso, Laurent Gbagbo sera secoué par un coup d’Etat au cours duquel son puissant ministre de l’Intérieur et de la sécurité sera atrocement tué. En 2010, trop confiant de gagner la présidentielle 2010 malgré des rebelles en armes, Laurent Gbagbo a fait fi des mises en garde pour organiser des élections. La suite, on la connaît. Cette trop grande confiance en eux ont fini par couler ces différents régimes.

Mais Alassane Ouattara et son parti n’en ont pas tiré des enseignements, alors que l’adage enseigne qu’un homme averti en vaut deux. Le RDR a été triplement averti. Ils ont emboîté les pas à leurs prédécesseurs. Entre la justice partiale, l’usage de la force, l’impunité en faveur de ses soutiens, la catégorisation des Ivoiriens avec le fameux rattrapage ethnique, les détournements de deniers publics impunis, l’on note aussi la très grande arrogance du pouvoir Ouattara dont Amadou Soumahoro est le symbole au niveau du RDR, et Koné Bruno au niveau du gouvernement.

Que dire du maître des lieux, le président Ouattara lui-même ? Il a fait montre d’une arrogance défiant même les lois de la nature. Il s’est déclaré «indéboulonnable », comme un dieu. Il n’a jamais pris en compte les conseils des Ivoiriens toutes couches confondues pour la réussite de la réconciliation nationale. Même les interpellations des religieux sont passées comme dans les oreilles d’un sourd. Faisant à sa manière, le RDR dira que la Côte d’Ivoire avancera sans les autres qui refusent « la main tendue » de Ouattara, pourtant dénoncée par ceux vers qui elle est dirigée, y voyant un piège. Ouattara et le RDR ont organisé les élections comme ils l’entendent, méprisé les observations et attentes des autres. Le président Bédié a même décrié le découpage électoral de 2011, lors du congrès du PDCI en 2012. Tant de griefs contre son régime, tant de conseils, mais Ouattara n’a fait que ce qu’il lui semblait bon.

Dans cette politique, il s’est entouré de griots pour lui faciliter la tâche. Amadou Soumahoro, Cissé Bacongo, Bruno Koné et Joël N’guessan, pour ne citer que ceux-là. Le premier, baptisé ‘’Amadou Cimetière’’, a même promis la mort aux opposants de Ouattara. Dans son propre camp, de quelles menaces n’a-t-il pas usé à l’endroit des candidats indépendants lors des élections législatives ? Il a aligné de nombreuses frasques langagières et tribales qu’aujourd’hui, ses alliés d’hier le dénoncent. Cissé Bacongo, le juriste, l’homme des grandes missions, pour défendre la nationalité, pour aider à faire passer les projets impopulaires. Koné Bruno très incisif a fini par avoir pour son compte dans l’affaire dite des « 200 ». Joël N’guessan, quant à lui, en sa qualité de porte-parole du RDR se permettait de dire tout ce qui lui passait par la tête, quitte à ce que cela fasse l’affaire de son parti. Des propos et des actes qui dans leur ensemble montrent beaucoup d’arrogance et un mépris pour les autres Ivoiriens. Au point d’exaspérer leurs propres militants.

A cause de ce qu’ils ne pensent qu’à eux seuls et non aux intérêts des autres, le régime Ouattara a voulu que tous ses alliés s’alignent sur ses leurs volontés. Sinon, c’est la porte. En 2012, la surprise générale, le chef de l’Etat a dissout le gouvernement du Premier ministre Ahoussou parce que les députés des autres partis membres du RHDP (PDCI, UDPCI, UPCI) ont osé s’opposer au projet de loi sur le mariage. Récemment, il a chassé du gouvernement ses alliés UDPCI et UPCI parce que ces partis ont refusé de se soumettre à ses exigences et ont osé présenter des candidats sous leurs bannières respectives. Les amis et collaborateurs de Guillaume Soro en ont appris à leurs dépens. Ils ont aussi été démis de leurs fonctions à la faveur de la crise de confiance entre Soro et Ouattara.

L’autre mesure de l’arrogance du RDR, c’est le fait qu’il se considère comme le plus grand parti de Côte d’Ivoire. Au point d’affirmer qu’en six ans, Ouattara a fait plus que Félix H. Boigny en 30 ans. Alors que sans le PDCI, les Forces nouvelles, il ne serait certainement pas au  pouvoir en ce moment. Aujourd’hui, le RDR paie pour cette arrogance. Abandonné par ses propres militants, il est seul contre tous. Aux abois, comprenant le danger qui les guette, Amadou Soumahoro et le RDR font la Cour au PDCI. Mais, il est trop tard. Le train de la division est déjà lancé. Bédié et le PDCI, leurs principales forces ne veulent pas lâcher prise. Et se disent même prêts à faire une alliance avec le FPI, ce qui ne donnera aucune chance au RDR de conserver le pouvoir, qui veulent encore pour 40 ans. C’est dans ce naufrage où il prend l’eau de partout que le RDR tient bientôt son congrès. Que va-t-il décider ?