Dans une interview au site français Marianne, parue le jeudi 27 juillet 2017, Michel Gbagbo parle de la situation sociopolitique qui prévaut en ce moment en Côte d’Ivoire, qui, selon lui, résulte de l’échec de la réconciliation nationale. Là-dessus, il croit que le chef de l’Etat Alassane Ouattara fait « une grave erreur ».
Les Jeux de la Francophonie s’achèvent. Ce devait être une belle vitrine pour la Côte d’Ivoire renaissante ?
Michel Gbagbo. C’est incontestablement un échec en termes de mobilisation populaire et cela tient beaucoup au manque récurrent de légitimité du président Ouattara. Nombre de nos concitoyens ont le moral au plus bas, ils ne voient pas les bénéfices concrets de cette supposée renaissance, les emplois manquent, la vie est dure et ils n’avaient pas le cœur à s’amuser. D’ailleurs beaucoup estiment que ces Jeux ont été une source de gaspillage inutile. On a rasé des quartiers, des étudiants ont été privés de leurs chambres alors que les conditions de scolarité sont déjà précaires.
Marianne. Tout de même, n’était-ce pas l’occasion de montrer un autre visage, plus paisible, du pays ?
M.G. Depuis 2011, Alassane Ouattara s’efforce de séduire les milieux d’affaires et les milieux diplomatiques. En apparence, les chiffres macro-économiques sont bons, les affaires marchent bien mais en réalité le système est structurellement très fragile car la crise politique, elle, n’est pas réglée et empire. Croyez-moi, bien des investisseurs étrangers ne sont pas dupes et certains font leurs bagages.
Marianne. La question des prisonniers politiques constitue-t-elle un aspect important de cette crise ?
M.G. Evidemment car depuis l’accession de M. Ouattara au pouvoir, elle reste entière. A ses yeux, le processus de la réconciliation nationale est très secondaire, mais c’est une grave erreur. Aujourd’hui encore, près de 200 personnes sont encore détenues dans une dizaine de centres pénitentiaires en attente d’un procès et d’un jugement, la plupart dans un état de santé délétère.
Marianne. Depuis combien de temps ?
M.G. Cela dépend bien sûr des cas, certains depuis 2011 ou 2012 mais en moyenne entre deux et trois ans, bien au-delà du « délai raisonnable » au terme duquel un prévenu doit être jugé.
Marianne. Qu’en est-il de leur défense ?
M.G. Ces détenus n’ont bien sûr plus de revenus, leurs comptes bancaires ont été fermés et leurs familles ne peuvent pas toujours les aider à se nourrir correctement, à se soigner et encore moins à payer des frais d’avocat. C’est donc un collectif d’avocats sollicités par le FPI (Front populaire ivoirien, le parti de Gbagbo) qui se charge de les représenter. Mais c’est une tâche compliquée car souvent les inculpés ne sont prévenus que tardivement qu’ils vont comparaître devant la justice, un ou deux jours avant…
Marianne. L’acquittement de Simone Gbagbo qui était poursuivie pour crimes contre l’humanité ne vous donne-t-il pas l’espoir d’une justice capable de se montrer impartiale?
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