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Politique

Côte d’Ivoire – Issiaka Sangaré : « Un parti n’est pas un bien patrimonial »

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Côte d’Ivoire – Issiaka Sangaré : « Un parti n’est pas un bien patrimonial »

Le secrétaire général du Front populaire ivoirien revient sur la décision de Laurent Gbagbo de céder le parti à Pascal Affi N’Guessan et sur les projets de sa famille politique.

Depuis quelques années, deux camps se menaient une guéguerre, parfois ouverte, au sein du Front populaire ivoirien. L’un composé d’inconditionnels du fondateur du parti, Laurent Gbagbo, les GOR (Gbagbo ou rien), l’autre fidèle à Pascal Affi N’Guessan, actuel président de la formation muni du sceau de la légalité. Mais depuis le retour du premier en Côte d’Ivoire le 17 juin, après dix années passées à faire face à la Cour pénale internationale, la tension est montée d’un cran.

Si Gbagbo est présenté comme le président du FPI par ses partisans, le clan légal du parti, lui, n’hésite pas à rappeler qu’il n’en est rien. L’ancien chef de l’État ne cache pas ses ambitions et sa volonté de jouer un rôle de premier plan, mais la division au sein de sa famille politique constituait un frein important à ses visées. C’est donc sans surprise que l’annonce, le 9 août, qu’il allait créer un nouveau parti a été accueillie.

Pascal Affi N’Guessan, qui s’était muré dans le silence depuis le retour de l’ancien président, s’exprimera le 14 août à l’issue d’un comité central extraordinaire. En attendant, c’est Issiaka Sangaré, son secrétaire général, qui est monté au créneau ces dernières semaines, à chaque fois que le parti estimait que les GOR outrepassaient leurs droits.

Dans cette interview qu’il a accordée à Jeune Afrique le 12 août, quelques heures avant de rejoindre ses camarades pour une réunion du secrétariat général de la direction du parti destinée à préparer le comité central du lendemain, Issiaka Sangaré a évoqué les raisons de cette séparation et les ambitions du FPI.

Jeune Afrique : L’ancien président Laurent Gbagbo a annoncé vouloir créer un nouveau parti, mettant fin à des années de division au sein du FPI. Cette décision vous a-t-elle surpris ?

Issiaka Sangaré : Nous nous y attendions dans une certaine mesure parce que nous savions qu’il ne pouvait pas contourner la loi. S’engager dans cette voie aurait été une impasse. Pascal Affi N’Guessan a été élu président du FPI en 2001, lorsque Laurent Gabgbo a été élu à la tête du pays, la première fois que nous avons accédé au pouvoir d’État. C’est un ensemble de congrès qui l’ont reconduit à ce poste, jusqu’au dernier, en 2018. Nous sommes allés aux élections avec le logo du FPI. Les pro-Gbagbo, eux, ont participé à ces scrutins sous le sigle EDS [Ensemble pour la démocratie et la souveraineté]. Nous avons pris acte de cette décision.

Quelles sont selon vous les raisons qui ont conduit à la division ?

Il est vrai que la page est tournée. Mais au nom de la vérité historique, nous devons parfois préciser les choses. La réalité c’est qu’il n’y a pas deux FPI. Dès lors que Pascal Affi N’Guessan a été libéré en 2013, après la crise post-électorale, il a pris son bâton de pèlerin pour rencontrer les militants et faire savoir à nos concitoyens et concitoyennes que le FPI était toujours là. Il fallait rallumer la flamme parce que beaucoup de nos sympathisants et militants s’étaient terrés par peur et se posaient des questions sur l’avenir du parti. C’était un acte majeur.

Mais certains y ont tout de suite vu l’expression d’une volonté de leadership et ont commencé à exprimer des crispations. Vous avez entendu Laurent Gbagbo parler de « louvoiements ». Cela viendrait certainement du fait que certains ont commencé à lui faire des rapports. Mais Affi N’Guessan n’a pas de problème avec ce dernier, qu’il s’agisse de questions de trahison, d’incompétence ou d’incapacité.

La réelle cause de cette division, c’est le leadership. Il faudrait que les Africains comprennent qu’il est important de mettre en évidence la gouvernance. Et pas seulement quand on est dans l’opposition, mais aussi lorsque l’on gère les affaires de l’État. Il faut aussi accepter, avec le temps, lorsqu’on a fini sa mission, de passer le relais et de mettre en œuvre une alternance.

Nous estimons que Laurent Gbagbo est libre de créer un autre parti. Mais pour nous, c’est manquer de pragmatisme que de faire ce choix. La meilleure des approches aurait été de privilégier la voie du dialogue, le maintien de la famille politique, plutôt que de provoquer sa déflagration. Mais c’est un défi pour nous. Chacun doit comprendre qu’au-delà des personnes, nous nous battons pour la pérennité des institutions.

Comment comptez-vous continuer à faire vivre le parti sans son très influent fondateur ?

Pour la plupart, nous avons adhéré au FPI de façon libre et bénévole, en nous disant que nous étions dans un système qui ferait plutôt prévaloir les institutions et les textes. C’est ce qui nous a rassemblés au départ. Nous étions fortement attachés à ce credo. Et nous saluons la victoire de l’expression des textes sur la volonté des individus.

Il est évident que le parti a continué à vivre après l’arrestation de Laurent Gbagbo, qui n’était déjà plus son président dès lors qu’il accédait à la magistrature suprême. La Constitution prévoyait en effet qu’on ne pouvait pas être en même temps chef de l’État et leader d’un parti politique afin de sauvegarder les intérêts généraux et nationaux.

avons participé à des élections, notamment en 2015, pour faire comprendre que nous continuions d’exister, que l’idéal socialiste de gauche n’était pas mort, et qu’un parti continuait de s’engager aux côtés des populations. Évidemment, ce fut avec des fortunes diverses, parce que l’environnement était difficile en 2015. Beaucoup de nos concitoyens avaient toujours peur de s’exprimer dans le jeu politique. De nombreux camarades de parti et de concitoyens vivaient en exil. Les avoirs de certains, dont les miens, étaient gelés. Nous n’avions alors pas les moyens de déployer toutes nos capacités. Mais nous avons été présents et cela a permis au FPI de continuer à vivre. Et c’est là que nous saluons la résilience du président Pascal Affi N’Guessan.

Mais même s’il est lui aussi ancré dans une logique de leadership, le FPI a amorcé un mouvement de légitimisation institutionnelle. On ne saurait changer notre philosophie interne, les aspirations qui nous ont amenés à entrer dans cette formation, parce qu’on porte de l’affection à un individu. Il faut plutôt privilégier un système.

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