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Mali : « On ne peut pas exclure une communauté entière et vouloir arriver à une paix consensuelle », dixit Aliou Diallo

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Mali : « On ne peut pas exclure une communauté entière et vouloir arriver à une paix consensuelle », dixit Aliou Diallo

Arrivé 3e, avec 8,03% de voix au premier tour de la présidentielle de 2018 au Mali, l’homme d’affaires malien Aliou Boubacar Diallo, fondateur et président d’honneur de l’Alliance démocratique pour la paix (ADP-Maliba), a soutenu dans une interview accordée à ALERTE INFO, qu’"il est temps de revoir le schéma pour arriver à la paix au Mali", ajoutant que cela passe aussi par un dialogue avec les groupes djihadistes.

ALERTE INFO :  Le 02 mai 2019 a été signé au Mali, un accord politique de gouvernance, dont l’ADP-Maliba n’est pas signataire. Vous avez dit que vous n’avez pas été associé à cet accord, mais le Premier ministre Boubou Cissé a dit que "la porte reste ouverte" et des partis continuent d’adhérer. Qu’attendez-vous pour signer cet accord, ou est-ce une posture politique ?

ALIOU DIALLO : Vous savez, il est très difficile de se prononcer sur un document dont on ne connaît même pas le contenu. Nous n’avons pas été consultés, nous ne connaissons même pas le contenu de cet accord politique qu’on ne nous a pas présenté.

ALERTE INFO : Est-ce que l’accord en lui-même vous intéresse ?

ALIOU DIALLO : Tout ce qui concerne la paix au Mali nous intéresse. Quand il a été nommé Premier ministre, (Boubou Cissé) est allé saluer quelques formations politiques, il les a invités pour discuter de l’accord politique. Je ne lui reproche pas cela, mais nous n’avons pas reçu de visite, nous n’avons pas été consulté. Nous ne nous inviterons pas intrus dans une négociation ou dans un dialogue. Aussi simple que ça.

ALERTE INFO : En décembre 2018, la Cour constitutionnelle, évoquant "des difficultés à l’organisation des législatives", a prorogé de 6 mois, le mandat des députés maliens. A l’approche de la fin de cette prorogation fixée au 30 juin 2019, vous vous êtes opposé à une nouvelle prorogation et proposé la mise en place d’une assemblée constituante au sein de laquelle vous aurez des délégués. Par quel moyen comptez-vous obtenir ce que vous demandez ?

ALIOU DIALLO : Nous allons écrire à la Cour constitutionnelle, parce que c’est une perpétuation d’une situation anticonstitutionnelle. Pour moi, cette assemblée qui est là, née après l’élection présidentielle de 2013, est l’arrêt sur image des forces politiques en présence à cette époque. Depuis cette date, la situation politique a évolué au Mali. Il y a de nouvelles forces politiques qui ont émergé. Il y a de nouveaux visages et des forces politiques qui se sont confirmés. On me dit qu’(avec une assemblée constituante), il y a un risque d’aller vers un vide constitutionnel, mais ce vide constitutionnel est déjà là. Il est déjà là, parce que le mandat des députés est périmé (et) cette assemblée n’est plus représentative.

ALERTE INFO : En 2013, vous étiez dans la majorité présidentielle, vous avez soutenu, et même financé la campagne du candidat Ibrahim Boubacar Kéita. Vous avez affirmé plus tard que vous vous êtes trompé. Depuis lors, vous êtes passé dans l’opposition, où vous êtes proche de Cheick Modibo Diarra, arrivé 4e à la présidentielle de 2018. Est-ce que vous prévoyez dans votre stratégie politique vous rapprocher un jour de l’Union pour la république et la démocratie (URD) de Soumaila Cissé pour former un bloc d’opposition ?

ALIOU DIALLO :  Nous sommes dans l’opposition avec notre identité, notre originalité. Je ne vois pas un chef de l’opposition qui est chef de mon parti. Mon parti est indépendant. Soumaila Cissé est certes chef de son parti, nous sommes tous dans l’opposition, mais je ne le considère pas comme le chef de l’opposition que je représente. C’est une opposition plurielle, nous devons en tenir compte. Nous pouvons avoir des convergences de but à atteindre ensemble, ça c’est possible. Dans le passé ça c’est déjà fait sur notre lutte contre la réforme constitutionnelle qui a été avortée. Cela étant, nous avons notre autonomie, notre identité, notre particularité. Nous sommes dans une opposition républicaine que nous comptons incarner à notre façon.

ALERTE INFO : A 59 ans, vous êtes le plus jeune de toutes les grandes figures de la politique malienne. Est-ce que vous ne seriez pas tenté d’être le porte-flambeau de cette opposition-là, au Mali ?

ALIOU DIALLO : En tout cas au Mali, il y a une nécessité d’aller vers un renouvellement de la classe politique. Le fait que les gens ne votent plus, le fait que les taux de participation soient de plus en plus bas aux échéances électorales, ça veut vraiment dire que les gens ne s’intéressent plus à la chose politique, parce qu’elle est incarnée par des acteurs politiques auxquels ils n’ont plus confiance. Donc, il y a une nécessité d’aller vers ce que j’appelle, l’exogène.

ALERTE INFO : Avec l’invasion djihadiste en 2013 au Mali, vous avez organisé un couloir humanitaire afin de ravitailler les villes du Nord, à partir de Bamako. Aujourd’hui vous avez fermé ce couloir, est-ce que cela veut dire que vous avez désespéré du Mali ?

ALIOU DIALLO : Nous continuons toujours le couloir humanitaire. Mais aujourd’hui, il y a tellement de déplacés, des dizaines de milliers de déplacés du Centre et du Nord qui se trouvent à Bamako même, que nul besoin d’aller jusqu’au fin fond du pays pour retrouver et faire de la distribution de vivres à ces frères qui souffrent de cette insécurité, de cette instabilité, parce qu’ils se sont tous déplacés en masse.

ALERTE INFO : Que pensez-vous du Mali aujourd’hui ?

ALIOU DIALLO : Moi, je dis que la situation sécuritaire s’est dégradée. Il y a de plus en plus de morts innocents, Maliens, Etrangers. Même nos militaires sont attaqués dans leurs camps. Les forces étrangères amies ont aussi subi de lourdes pertes. Il est temps de revoir notre schéma pour arriver à la paix, parce qu’on n’arrive pas à réduire le nombre de morts innocents. Pour y arriver, je pense qu’il y a des efforts à faire de part et d’autre, du côté de l’Etat malien, du côté des mouvements signataires de l’accord de paix (d’Alger de 2015), ainsi que du côté de la communauté internationale, pour qu’ensemble, on aille vers une grande vérité réconciliation, justice.

ALERTE INFO : Dans son rapport publié le 28 mai, le groupe de réflexion international (CRIS Group) a proposé de changer de cap au Mali en dialoguant avec les groupes extrémistes qui sévissent dans le Centre et le Nord du pays. Que pensez-vous de cette proposition ?

ALIOU DIALLO : Je vais vous dire une chose. Nous sommes tous des Maliens, mais il y en a quin’ont pas les mêmes boussoles que les autres. Ce qui les pousse à commettre des exactions.
L’impunité, Non ! Mais aller vers une vérité, réconciliation, justice, Oui ! Je pense que tout le monde a de la place dans notre Mali et ceux qui doivent être jugés seront jugés. On ne peut pas exclure une communauté entière et vouloir arriver à une paix consensuelle.
Je pense donc que nous devons être tous autour d’une table, tous autant que nous sommes, du Nord, Centre au Sud, pour essayer de poser les vrais problèmes pour aller vers la diminution de l’économie criminelle, pour qu’il y ait de plus de en plus d’acteurs dans l’économie réelle, légale, et qu’il y ait de moins en moins d’acteurs dans l’économie criminelle et pour qu’enfin, tout le monde puisse avoir la paix et vivre en paix avec soit même, avec ses voisins, sans être tenté par l’appas du gain qui les pousse souvent vers cette criminalité.

ALERTE INFO : Après la publication de ce rapport, les autorités maliennes se sont dites prêtent à dialoguer avec les groupes djihadistes, mais il y a quelques années, avec l’accord de la France, elles ont catégoriquement rejeté cette idée.

ALIOU DIALLO : De toute façon, sans ce dialogue, je ne vois pas de solution. Toutes les guerres au monde ont fini autour d’une table. Donc on est obligé d’aller à ce dialogue.

ALERTE INFO  Aujourd’hui, le Mali est défiguré. Conflits intercommunautaires, attaques de groupes extrémistes contre des civils et des militaires, pauvreté, crise humanitaire, économie en baisse, fronde sociale, crise politique… Si vous deviez vous attaquer à l’un de ces problèmes, quelle serait pour vous la priorité ?

ALIOU DIALLO  Rien n’est possible sans la sécurité et la paix. Il faut qu’on aille très rapidement vers la paix et la sécurité. Le potentiel économique est là, il est avéré, mais sans la paix, vous ne pouvez pas avoir d’investisseurs. Mêmes les investisseurs nationaux vont vouloir se délocaliser pour aller à l’extérieur, et ce ne sont pas les investisseurs étrangers qui viendront, quand ils verront les nationaux prendre la fuite. Il faut donc qu’on aille vers un climat apaisé, vers la paix, vers la sécurité et après mettre en valeur le potentiel que nous avons.

ALERTE INFO : Que pensez-vous de la présence des forces étrangères au Mali, dont le mandat et les actions sont de plus en plus critiqués, surtout par la jeunesse malienne ?

ALIOU DIALLO : Il y a déjà un constat qui est là. Nous avons des problèmes au niveau de l’armée malienne. Problème d’équipement, de formation, d’encadrement. Et là, nous avons besoin d’assistance étrangère pour remonter ces déficits. Nous pouvons avoir des partenariats étrangers pour avoir une armée plus performante, une armée opérationnelle.Mais les accords avec nos amis étrangers doivent être bien étudiés, avec un mandat clair et précis, pour permettre au Mali de retrouver la paix. Ces accords ne sont pas faits pour tuer des Maliens, tous les partenariats dans lesquels nous nous sommes engagés sont faits pour aller vers la paix, vers la réduction de la criminalité transfrontalière. Vu sous cet angle, nous pouvons toujours travailler avec des amis étrangers pour essayer de réduire des pertes en vies humaines.

ALERTE INFO : La jeunesse malienne pense qu’il faut plutôt équiper l’armée malienne qui fera ce travail de sécurisation, tout en préservant la souveraineté du Mali.

ALIOU DIALLO : Cela ne se fait pas du jour au lendemain. Ça prend du temps et il faut pour cela que l’économie rebondisse, qu’il y ait des moyens financiers. Autrement, il faut tisser des partenariats étrangers pour avoir ces financements. Tout est lié. Moi, je pense qu’on a besoin d’un partenariat avec l’étranger, beaucoup plus d’ailleurs sur le plan économique et financier, sur le plan technique aussi, pour mettre à jour notre armée et aller beaucoup plus vers son autonomisation.

Source: ALERTE INFO

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