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A la frontière syrienne, les prothèses de l’espoir

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A Reyhanli, ville frontalière turque, un centre propose aux Syriens mutilés par le conflit voisin de leur installer gratuitement des prothèses. En l’espace de cinq ans, 6 500 membres artificiels ont été posés. Reportage dans cette clinique qui répare les corps et où le personnel a dû adapter ses thérapies aux blessures de guerre.

Le geste paraît simple. Ahmed s’y emploie avec attention. A moitié allongé sur le trottoir, il rassemble toutes ses forces avant de jeter avec conviction des cailloux sur le chien braillard qui s’agite derrière la grille. Loupé. Il recommence. A entendre ses rires, difficile de percevoir la différence avec un autre enfant de son âge. Mais seulement si on ne prête pas attention à ses jambes. Ou plutôt, à leur absence. Car si Ahmed s’affaisse sur le trottoir, ce n’est pas que la position soit plus stratégique. Non, elle est simplement plus reposante. Le garçon de 11 ans tente de récupérer après l’un de ses exercices quotidiens : un aller-retour sur la route poussiéreuse, juste devant la clinique, clopin-clopant sur ses deux prothèses articulées. Embêter un chien apparaît comme une soupape de décompression. Quelques pierres et ruses plus tard, l’enfant récupère ses béquilles et se relève péniblement sur ses « jambes » métalliques, épaulé par un accompagnateur. Direction le centre de prothèses, pour effectuer les derniers ajustements.

86 000 Syriens amputés en raison de la guerre

C’est là qu’Ahmed a pu essayer ses nouvelles jambes pour la première fois. Moulées sur mesure, elles ont été fabriquées par le centre NSPPL (Projet national syrien pour les membres artificiels), créé il y a cinq ans par des Syriens en exil à Reyhanli, petite ville turque à la frontière avec la Syrie. Objectif du lieu : concevoir et poser gratuitement des prothèses de jambes ou de bras aux Syriens mutilés par la guerre. Et il y a urgence. Car si aucun chiffre officiel concernant les amputés ou les handicapés syriens n’existe, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) rappelle que le nombre d’amputés en raison du conflit, qui dure depuis plus de sept ans, n’a cessé d’augmenter. L’Unicef estime pour sa part qu’au moins 86 000 Syriens ont été amputés en raison de la guerre, selon un rapport de l’organisation publié en mars 2018. De la fenêtre du bureau du directeur, au premier étage, la frontière est d’ailleurs si proche qu’on peut aisément voir le mur qui sépare les deux pays. Ce n’est pas un hasard si le centre a été créé ici. La province turque de Hatay, dans laquelle Reyhanli est situé, compte près d‘un demi-million de réfugiés syriens (presque 13 % des 3,6 millions enregistrés sur le sol turc) et il n’est pas rare que les enseignes des magasins soient écrites en turc et en arabe. L’initiative NSPPL comprend également, depuis mars 2015, une clinique mobile près d’Idlib, en Syrie, à quelques dizaines de kilomètres de là.

Une prothèse basique coûte plus de 500 dollars?

Si, au début, le centre ne fonctionnait qu’avec des bénévoles, très vite, les financements sont arrivés par le biais de différentes ONG. Et, depuis août 2017, il est soutenu principalement par l’Union européenne, à travers l’ONG Relief International, à hauteur de plus de 1 million d’euros. « Le poids du handicap de la population syrienne en Turquie n’est pas connu. Nous voulons compléter leur système de santé en apportant une aide spécialisée aux réfugiés », précise Andrea Patterson, responsable de la Turquie pour Relief International. Une aide primordiale puisqu’une prothèse basique coûte plus de 500 dollars, quand les modèles les plus perfectionnés peuvent grimper jusqu’à 2 000 dollars. Une somme impossible à débourser pour un réfugié, qui plus est lorsqu’il n’est plus en mesure de travailler à cause de son amputation. Ici, une simple ordonnance émanant d’un hôpital turc est réclamée. Et c’est peu dire que les patients, à majorité masculin, se pressent à la porte du centre : jusqu’à maintenant, 6 500 prothèses ont été posées et, cette année, plus de 500 personnes ont déjà été traitées. La liste d’attente est de plusieurs mois. Chaque matin, la même scène se répète : une poignée de patients s’extirpe cahin-caha d’un van qui leur est affrété et afflue vers l’entrée de cet immeuble anonyme. Certains sont en fauteuil roulant, d’autres ont la démarche vacillante. Mais tous sont amputés d’un membre.

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